Magie d'automne
A l'automne, on peut voir l'âpre pays lorrain
tressaillir jusqu'au fond de son âme émouvante,
Et ses attraits, qu'on la dénigre ou qu'on la vante,
ont dans leur fin dolente un charme souverain.
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Au matin, du brouillard tamisant l'étendue
Emergent peu à peu les hameaux engourdis,
Le couronnement d'or des arbres alourdis,
Les revers gras des champs ouverts par la charrue.
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Le soleil brille, mais ses feux sont adoucis.
Le bleu du ciel se fond en pâleurs nostalgiques;
Les vignes, les fourrés ont l'air majoliques;
Le rêve frissonnat emplit les bois roussis.
*
Les chars rentrent, pesants des récoltes dernières,
A la brume hâtive ; et l'on entend les pas,
Les voix et les appels de ceux qu'on ne voit pas
Revenir le front las, mais l'oeil plein de lumières.
*
Et le Lorrain voyant son bien-être à l'abri,
Avant de prendre un coin pour l'hiver près de l'âtre,
Vers la terre, si bonne au labeur opiniâtre,
Se retourne et lui jette un regard attendri.
Ernest François